En même temps, tant qu’il ne s’agit que de paroles et qu’il n’y a pas d’accords ni de décisions impliquant d’évacuation de territoires et de colonies, il n’y a pas non plus de pression exercée de l’intérieur sur le gouvernement. La coalition continue de fonctionner sans avoir à faire face à des manifestations ni à des protestations de la droite.
Olmert comprend cela parfaitement et sa politique évolue dans le no man’s land qui sépare les paroles des actes. Lors de chacune de ses apparitions à Paris et à Londres, Olmert a revu à la baisse les attentes à l’égard de la conférence d’Annapolis. « Ce n’est pas une conférence », a-t-il répété. Qu’est-ce alors ? « Quand on dit ‘conférence’, on pense à des journées de discussions et de négociations entre les participants. Ce n’est pas le but de la rencontre d’Annapolis qui était, dès le départ, de créer un environnement encourageant les discussions directes ». Autrement dit, une séance de photos d’hommes d’état exprimant leur soutien à la « solution à deux Etats » sans en discuter le contenu.
Selon Olmert, la déclaration commune qui sera présentée lors la conférence abordera toutes les « questions centrales » mais n’offrira pas de solutions : seulement des orientations pour d’ultérieures négociations détaillées. Et même si un accord devait être conclu à l’avenir, sa mise en œuvre serait subordonnée à la « Feuille de Route »; autrement dit, dans la première phase, à l’éradication du terrorisme palestinien.
Si l’on traduit le langage diplomatique, Olmert dit ceci : je réponds à l’attente internationale en discutant avec Abou Mazen bien qu’il soit clair, tant pour lui que pour moi, que ces échanges n’entraîneront pas de changements dans la situation sur le terrain. Si je présente aux dirigeants du Fatah un « horizon diplomatique », ils auront peut-être une chance de survie en Cisjordanie et même s’ils tombent et que le Hamas prend le contrôle de Ramallah, Naplouse et Hébron, ce ne sera pas la faute d’Israël. En attendant, on ne peut presser les négociations et il faut différer la mise en œuvre de manière à ce que ma coalition ne se brise pas et que mon gouvernement ait un agenda.
A son retour d’Europe, Olmert peut faire le V de la victoire. Nicolas Sarkozy et Gordon Brown ont adopté son message et l’ont seulement encouragé à poursuivre les pourparlers et les gestes envers Mahmoud Abbas, tout en offrant « leur soutien et leur implication dans le processus ». Tout semble indiquer qu’Olmert n’a pas entendu la moindre critique à propos des colonies et de la clôture de séparation.
Les médias français et britanniques ont presque totalement ignoré Olmert, ses rencontres avec les communautés juives ont eu lieu dans des salles à moitié vides et, dans les rues, on n’a pas même vu la poignée de manifestants qui accueillaient Ariel Sharon avec des calicots en faveur de la Palestine. On peut déduire de tout ceci que tant qu’il n’y a pas de crise, « le monde » ne s’intéresse pas au conflit israélo-palestinien ni à sa résolution. Que les deux parties discutent entre elles lui suffit. Et en attendant, le consensus général sur le fait qu’Abbas est faible et ne peut rien accomplir, prévient toute pression sur Israël.
Sur la scène intérieure israélienne également, le sentiment répandu qu’ « il ne sortira rien de là » constitue un appui pour le Premier ministre. La conférence d’Annapolis et les discussions préparatoires n’éveillent strictement aucun intérêt dans la population. L’opposition reste silencieuse à droite comme à gauche. Olmert dit que la coalition passera sans heurts la conférence d’Annapolis et que « le jour venu », le futur accord jouira du soutien de la majorité des Juifs d’Israël.
Il n’est pas le premier à bénéficier des commodités d’un « processus de paix » en cours et dont le terme n’est pas connu (« Il n’y a pas de dates sacrées », disait Yitzhak Rabin). Autrefois, on déclarait, à l’encontre d’Israël, que cette politique était une conspiration destinée à endormir l’opinion publique internationale et à couvrir l’expansion des colonies et une boulimie de terres. Mais Olmert, contrairement à ses prédécesseurs, a déclaré d’emblée qu’il voulait quitter les Territoires. Il ne tient pour sacrée aucune pierre, aucune colline. Ses mobiles sont autres : il veut rester au pouvoir et conserver un appui politique large pour ses démarches diplomatiques.
La seule question est : combien de temps pourra-t-il continuer de marcher ainsi en no man’s land avant que l’apathie ne se mue en déception, laquelle augmentera le risque d’embrasement avec les Palestiniens – ou rallumera la polémique interne.
www.haaretz.co.il/hasite/spages/916737.html
Version anglaise : Policy in no-man's-land
www.haaretz.com/hasen/spages/916789.html
Source traduction : Palestine Solidarité
http://www.palestin
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